Depuis l'age de mes 14 ans, ma passion, mon loisir, c'est le cyclisme.
Inscrit dans un club, mon temps libre est dés lors consacré à mon sport favori. Avec mes petites économies j'achète mon premier vélo de course d'occasion. A l'époque, apprenti en boulangerie, c'est encore avec de la farine dans les cheveux que je partais tous les dimanches matins disputer les courses des villes et villages alentours. Tous les week-end je me donnais à fond sur mon vélo, étant souvent à l'origine de belles échappées notamment en côtes et en montagne, mon lieu de prédilection ! Quelques bons résultats, ma sélection pour les championnats de France, ma motivation me font espérer un bel avenir dans la poursuite du cyclisme.
C'est alors qu'un jour du mois de mars 1991, sous un temps maussade, après quatre heures où j'ai tout donné, en tête de course, j'aborde le sprint final et soudain un de mes coéquipiers placé juste devant moi chute, et là impossible de l'éviter. Lui n'aura que quelques égratignures. Moi je me réveillerai quelques temps après dans l'ambulance me conduisant à l'hôpital. Bilan : traumatisme crânien sévère avec formation d'un hématome comprimant le nerf optique, il faut opérer de toute urgence. Le casque à lanières que je portais ce jour-là a éclaté sur le bitume. A 20 ans le cours de ma vie est désormais totalement bouleversé. Les lésions de mes yeux sont irréversibles, je n'y vois presque plus et rien ne pourra me guérir.
Il a alors fallu que je réapprenne tous les gestes de la vie quotidienne, comment me déplacer avec une canne blanche, apprendre le braille, faire une formation professionnelle adaptée. Pleins de gens formidables m'y ont aidés, j'ai appris à connaître ce milieu de l'handicap qui m'était totalement inconnu jusqu'alors, et, à force de courage et de volonté, j'ai reconstruit ma vie sur ces nouvelles bases.
Et le vélo, obligé de l'oublier ? J'y ai cru un moment jusqu'à ce qu'un ami me le fasse redécouvrir sous une autre forme : à deux, en tandem. Et là, ma passion s'est ravivée de plus belle, enfin mon rêve revenait réalité, mes ambitions allaient être à nouveau possibles. Avec un vieux tandem, j'ai alors parcouru des milliers de kilomètres : les cols des Pyrénées, les cyclotouristes, l'ensemble du tour des Pyrénées, le tour de l'Andalousie …
J'ai fait une rencontre formidable : celle du Président du club cycliste de St Girons associé à la fondation italienne Fabio Casartelli. Fabio, souvenez-vous, était ce jeune coureur décédé lors du tour de France 1995 dans la descente du col du Portet d'Aspet. Les parents et proches de Fabio ont été très touchés par mon histoire, par mon accident, et m'ont fait un superbe cadeau : un magnifique tandem de compétition. Je leur en serai éternellement reconnaissant. Chez eux, en Italie je suis toujours le bienvenu, ils m'ont fait rencontrer des personnalités du milieu cycliste, des coureurs, bref, ils ont exaucés mon rêve.
J'en ai la certitude et la preuve, il ne faut jamais baisser les bras, jamais abandonner ses rêves !
Laurent